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Planifier les soins pour promouvoir la santé et la volonté des patients en fin de vie : Une conversation longue et fragmentée…

"Les acteurs des soins de santé primaires ont un rôle majeur à jouer dans la facilitation de l’accès aux soins palliatifs, mais leur pratique s’est jusqu’alors heurtée dans notre pays au caractère fragmenté et mal coordonné des soins primaires, et à des besoins non négligeables en termes de formation. Ils demeurent cependant le premier contact des patients avec le système de soins, et sont également structurants pour la suite du parcours du patient au sein du système de santé."

Par: Sébastien Moine, Médecin généraliste, doctorant en santé publique (Laboratoire éducations et pratiques de santé, EA 3412, université Paris 13), membre du groupe de recherche « Décisions et responsabilités en fin de vie », Espace éthique région Ile-de-France /

Publié le : 28 Octobre 2014

Plus de 300.000 personnes décèdent chaque année en France d'une maladie susceptible de nécessiter des soins palliatifs [1], néanmoins seule une faible proportion de ces patients est en mesure d'accéder à ces soins.
Si plusieurs facteurs peuvent faire obstacle à l’accès à des ressources spécialisées de soins palliatifs, l’une des barrières majeures à l’instauration de soins palliatifs, et plus particulièrement à la mise en œuvre de soins de fin de vie de bonne qualité, reste l’échec à reconnaître que les patients atteints d’une maladie chronique avancée se rapprochent effectivement de la fin de leur vie [2].
Or, il est à présent clairement établi qu’une intégration précoce des soins palliatifs dans la prise en charge des personnes vivant avec une maladie grave, incurable et progressive a un impact sur la qualité (et parfois l’espérance) de vie de ces personnes, permet d’éviter les traitements agressifs et les hospitalisations non programmées, et est associée à des dépenses de santé inférieures à celles des autres patients en fin de vie [3].
 
Les acteurs des soins de santé primaires ont un rôle majeur à jouer dans la facilitation de l’accès aux soins palliatifs, mais leur pratique s’est jusqu’alors heurtée dans notre pays au caractère fragmenté et mal coordonné des soins primaires, et à des besoins non négligeables en termes de formation. Ils demeurent cependant le premier contact des patients avec le système de soins, et sont également structurants pour la suite du parcours du patient au sein du système de santé.
Notre première hypothèse est que le travail en authentiques équipes interprofessionnelles de soins primaires au sein des maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP), associé à une formation adéquate à l’utilisation d’outils simples peut contribuer à une identification précoce des patients se rapprochant de la fin de leur vie, afin de répondre à leurs besoins en termes de soins palliatifs.
Or, différents programmes européens ont montré que l’identification seule ne suffit pas à accroître en soi l’accès à des ressources spécialisées de soins palliatifs [4]. Notre seconde hypothèse est qu’elle doit s’articuler pour cela avec une formation spécifique des professionnels à la planification anticipée des soins. Il s’agit d’un ensemble de discussions au cours desquelles le patient vivant avec une maladie chronique avancée définit ce qu’il souhaite ou ne souhaite pas pour ses soins, afin que les professionnels de santé puissent répondre pour le mieux à ses besoins par des soins de qualité, garantissant le maximum de sécurité, conformément à ses préférences [5].
Cette conversation longue et fragmentée, mais pas nécessairement avec les mêmes interlocuteurs, doit permettre aux patients non pas d’exprimer un choix décorrélé de tout contexte ou de toute interaction, mais plutôt d’incarner à travers une série de microdécisions, ses préférences et sa volonté concernant sa santé.
 

Références

[1] Observatoire National de la Fin de Vie [ONFV]. (2012). Rapport 2011. Fin de Vie: Un premier état des lieux. Paris : ONFV.
[2] Harrison, N., Cavers, D., Campbell, C., & Murray, S. A. (2012). Are UK primary care teams formally identifying patients for palliative care before they die ? The British Journal of General Practice, 62(598), e344–352.
[3] Parikh, R. B., Kirch, R. A., Smith, T. J., & Temel, J. S. (2013). Early specialty palliative care--translating data in oncology into practice. The New England Journal of Medicine, 369(24), 2347–51.
[4] Shaw, K. L., Clifford, C., Thomas, K., & Meehan, H. (2010). Review: improving end-of-life care: a critical review of the gold standards framework in primary care. Palliative Medicine, 24(3), 317–29.
[5] National Institute for Health and Clinical Excellence [NICE]. (2011). Quality standard for end of life care for adults. Quality standard advice to the Secretary of State for Health. Londres : NICE.