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Approche de la mort et familles en souffrance : l’importance de la communication.
"Elle m’a alors demandé si elle avait le temps de rentrer chez elle pour prendre quelques affaires. Elle voulait être présente, à ses côtés, pour le dernier instant. Je ne pouvais pas lui répondre, nul ne connaît l’heure. Je lui ai simplement dit que son mari allait mourir et qu’à ma connaissance, pour des raisons qu’on n’explique pas, la plupart du temps les personnes meurent au moment où le proche s’absente."
Par: Christine de Gouvion Saint Cyr, Bénévole d’accompagnement, administratrice de la SFAP, vice présidente de l’association de bénévoles Être-là Grand Paris /
Publié le : 17 Juillet 2023
En entrant dans la chambre, je trouve un monsieur âgé, qu’on aurait pu imaginer en train de dormir, si sa respiration n’était pas saccadée et bruyante, marque significative de la phase agonique. C’est une respiration impressionnante quand on ne la connait pas, qui enchaîne des râles bruyants et des pauses respiratoires de plus en plus longues. Elle peut paraître inconfortable et anormale pour les proches. L’épouse, à ses côtés, est inquiète et m’explique que son mari était dans une maison spécialisée pour les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer et qu’il a été hospitalisé en urgence suite à une chute qui aurait provoqué une fracture du fémur. Entre alors l’infirmière du service que l’épouse a appelée car elle craint que son mari ne soit douloureux. Elle n’arrive pas à communiquer avec lui. L’infirmière répond qu’elle ne peut rien donner d’autre que ce qui a été prescrit et qu’il faudra voir avec le médecin le lendemain. Je sens la soignante sur la défensive devant l’insistance de l’épouse. Comme si elle craignait que l’épouse demande un produit pour accélérer la mort de son mari. Ou peut-être était-elle mal à l’aise pour expliquer à cette dame que son mari approchait de la fin. L’infirmière est repartie laissant l’épouse avec son angoisse et ses inquiétudes. Je ne suis pas soignante et en tant que bénévole nous n’interférons jamais dans les soins. Cependant, ayant une expérience des personnes en fin de vie, j’ai doucement expliqué à l’épouse, avec mes mots, ce qui était en train de se passer : la respiration qui ralentit, le processus de l’agonie, ce signe caractéristique de la fin de vie, qui n’est pas un signe de souffrance. Comprendre ce qui se jouait, l’a beaucoup rassurée. Elle m’a alors demandé si elle avait le temps de rentrer chez elle pour prendre quelques affaires. Elle voulait être présente, à ses côtés, pour le dernier instant. Je ne pouvais pas lui répondre, nul ne connaît l’heure. Je lui ai simplement dit que son mari allait mourir et qu’à ma connaissance, pour des raisons qu’on n’explique pas, la plupart du temps les personnes meurent au moment où le proche s’absente.
L’équipe a reçu quelques jours plus tard un petit mot de remerciement de l’épouse dont le mari est décédé 20 heures après notre entretien. La mort d’un proche n’est jamais chose facile, mais on adoucit l’épreuve en écoutant les angoisses qui s’expriment, en aidant l’autre à comprendre la situation, en lui donnant le temps de s’y préparer, tout en veillant à ce que la personne ne souffre pas.
A propos de ce texte
Ce texte est tiré du document Fin(s) de vie : s’approprier les enjeux d’un débat publié en mars 2023 par l'Espace éthique/IDF dans le cadre du débat sur la fin de vie